mercredi 28 décembre 2011

Mon bilan BD 2011


Résumer 3900 livres de BD parus en 2011 (sans compter les rééditions) est évidemment impossible. Chapeau aux journalistes ou aux fans qui n'en auraient lu ne serait qu'un cinquième. En ce qui me concerne,  j'ai dû m'offrir ou me faire offrir une petite centaine d'albums cette année, et pas tous du cru 2011 (intégrales, quand tu nous tiens). Mon bilan sera donc fatalement très très très partial et partiel.

Les grosses machines
On en a peu vus dans les rayonnages : pas d'Astérix, pas de Titeuf à se mettre sous la dent. Encore moins un Lucky Luke ou un Blake et Mortimer. Le rapport de l'ACBD décerne la palme du plus gros tirage à XIII (500.000 exemplaires) ce qui est tout à fait respectable mais loin d'être extraordinaire. La seule création originale à dépasser le tirage de 100.000 exemplaires est le Julia & Roem d'Enki Bilal. Juste après suivent les Chevaliers d'Emeraude de Tiburce Oger et un peu plus loin, le O Dingo ô Châteaux de Tardi et Manchette. Soit de l'auteur installé au point qu'on achète l'album plus pour lui que pour sa série, soit une adaptation d'un livre de fantasy extrêmement populaire. On cherchera autour des 50.000 exemplaires pour des albums "one shot" plus exigeants (Les Chroniques de Jérusalem, Voyage aux Iles de la Désolation, Les Ignorants...).

Mon classement de 2011
Je n'ai bien évidemment lu qu'une part infime de la production. Mon profil est celui de l'amateur éclairé qui va aimer les oeuvres de qualité, mais ne sortant pas trop des sentiers battus. Un auteur comme Blutch, avec son Pour en finir avec le cinéma, m'a laissé comme deux ronds de flan.



Très bien
Les albums qui sortent du lot en cette année 2011 ne sont pas légion, c'est à ça qu'on les reconnaît. Je tire donc mon chapeau aux Ignorants, d'Etienne Davodeau, un de ses meilleurs depuis un petit moment (il m'est déjà arrivé de piquer du nez dans certains de ses albums). Cette rencontre entre la BD et le vin est à la fois rafraîchissante et instructive, qu'on soit oenologue ou bédéphile. Mention spéciale aussi au Perroquet des Batignolles, l'adaptation du feuilleton radiophonique par un Stanislas qui marche dans les pas d'Hergé avec son récit aux faux air d'Oreille Cassée. Je ne peux pas passer sous silence le meilleur feuilleton du neuvième art, la saison 2 de Cité 14, une série que j'ai pris en route mais dont je n'arrive plus à décrocher. Les dessins au look faussement rétro, mi-Disney mi-Calvo, sont à tomber par terre. Signalons aussi la meilleure série jeunesse dont la qualité ne se dément pas, le troisème tome du Royaume

Bien
Mention décernée Un plan sur la comète, le dernier Jules en date. L'avoir lu saucissonné dans Spirou m'avait donné l'impression qu'il manquait de fluidité. En album, c'est beaucoup plus convaincant. On se laisse porter dans les aventures didactiques d'un héros toujours aussi attachant même si on ne retrouve pas le niveau du tout premier tome, un chef d'oeuvre absolu selon moi. A noter qu'Emile Bravo sait se dépêtrer du format des 44 planches avec brio et sans tirer à la ligne.



Dans le panthéon de mes auteurs favoris, Brüno a toujours une place à part. Son Atar Gull avec Fabien Nury mérite une mention, mais il y manque ce petit quelque chose qui en ferait un chef d'oeuvre. Mes chouchous au rendez-vous : Jean-Denis Pendanx et son Svoboda méritent une mention au palmarès. Des dessins magnifiques mais une histoire si courte (le premier tome fait 40 planches) qu'elle laisse sur sa faim. Il sera plus facile d'apprécier l'oeuvre en elle-même quand elle sera terminée. Les valeurs sûres n'ont pas démérité en 2011 : Il était une fois en France confirme qu'elle mérite sa place en 4x3 dans le métro et dans le top 5 des meilleures séries des années 2000, et Philip et Francis font autrement plus rêver que les aventures post-Jacobs de Blake et Mortimer, où on nous annonce la résurrection de Septimus.

Coup de coeur pour Le chanteur sans nom, un album passé relativement inaperçu en début d'année et qui a droit à juste titre à une sélection au festival d'Angoulême.

Encouragements
A Chimère(s) 1887, signé Arleston (mais pas sous son vrai nom), une bonne histoire dans le milieu des maisons closes dans le Paris de la fin du XIXe siècle. Certes, c'est encore un tome d'exposition, porté par le dessin lumineux de Vincent, mais la série s'annonce prometteuse et pas racoleuse, contrairement à ce qu'on pouvait craindre.

J'ai bien aimé aussi Voyage aux Iles de la Désolation, d'Emmanuel Lepage, un récit de voyage sur le navire qui relie les confettis de l'océan et transbahute des scientifiques en transit. Si l'histoire est intéressante sans plus, les dessins sont absolument magnifiques. Il m'est souvent arrivé de contempler une double page magistrale pendant quelques minutes. La fluidité du récit en pâtit un peu : c'est un livre qu'on regarde plus qu'on ne dévore.

De nombreux noms assez connus échouent dans cette catégorie, signe qu'ils ont fait déjà mieux :
- Lax et son deuxième tome de Pain d'Alouette, moins emballant que le premier, qui était déjà moins emballant que L'Aigle sans orteils.
- la petite musique de Guy Delisle, c'est comme du Phil Collins. C'est sympa, mais ça commence à ressembler à ce qu'il a fait avant. Même si le concept d'analyser le conflit israélo-palestinien vu du type qui va acheter son pain à la boulangerie est audacieux, les Chroniques de Jérusalem ont comme un faux air de redite avec celles de Birmanie, de Corée du Nord ou de Chine.
- le Quai d'Orsay t2 perd la surprise et le vent de fraîcheur qui animaient le premier. Ca reste de la très bonne BD, cela dit.
- Ghost Money t3, c'est très bien, mais ça se prend un tout petit peu trop au sérieux. Et le dessin réalisé à l'informatique donne un aspect assez froid à l'album, qui empêche de s'y attacher totalement.
- le nouveau Jonathan, Atsuko, et le dernier Jérôme K Jérôme Bloche poursuivent agréablement la série, sans la révolutionner.
- la magie du dessin de Turf opère dans Magasin sexuel, un OVNI qui aurait fait un très bon one-shot. Mon inquiétude, c'est qu'il y aura une suite...
- il est difficile de tirer un jugement définitif d'Aâma, le dernier Fréderick Peeters, tellement c'est cosmique.  Et dire qu'il en prévoit 11 tomes!

Passable
J'ai été fortement désorienté par le dernier Buddy Longway. Derib abandonne la forme classique des histoire de son trappeur passé de vie à trépas à l'album précédent, et met en scène les souvenirs de sa fille, Kathleen, sous forme d'aquarelles. On sent que l'auteur s'est fait plaisir. Moi, en tant que lecteur, moins.

Le dernier Spirou, La Face cachée du Z, est soit un tome d'exposition génial pour introduire le retour de Zorglub et ses ambitions lunaires, soit une tentative de BD d'action un peu loupée. L'avenir nous le dira.



La BD indépendante n'a pas cassé des briques en cette année 2011. Les soucis de L'Association, mon rejet face au bouquin "olé-olé" de Bastien Vivès, un Fabcaro en légère baisse de régime (rendez-nous Like a steak machine!!) expliquent en partie cette année creuse. Je n'ai pas lu Habibi qui paraît-il est un chef d'oeuvre, donc le jugement est peut-être à nuancer.

Je fonde beaucoup d'espoirs pour 2012, notamment la sortie de la fin de la série De Cape et de Crocs. Mais c'est un autre sujet de post...

mardi 13 décembre 2011

"Groutchmeuhhh" la plus belle onomatopée de la BD?

De nombreuses phrases de BD sont restées célèbres. "Mille milliards de mille sabords", "Quand est-ce qu'on mange", "je veux être calife à la place du calife", "tu es tombé dans la potion magique quand tu étais petit" et j'en passe.

Peu de cris des nombreuses créatures fantasmagoriques du neuvième art sont elles rentrées dans la légende. On pense tout de suite au "houba houba" du Marsupilami, mais la liste s'arrête bien souvent là. La raison principale est bien sûr l'absence de créatures fantasmagoriques dans nombre de BD élevées au rang de classiques : Tintin, Lucky Luke et Astérix ont pour animal de compagnie un bête chien, et Milou comme Idéfix font "ouah ouah". Pour Rantanplan, c'est un peu plus compliqué.

La plus belle de toutes ces onomatopées, c'est le "Groutchmeuh" du vaisseau-dragon de Barbe Noire, dans la série éponyme de Marcel Remacle, publiée dans Spirou dans les années 60-70.  L'album, le n°6 est intitulé Dans la gueule du dragon. Barbe Noire s'est fabriqué un vaisseau en forme de dragon qui épouvante les équipages, abandonnant leur navire. Il n'a plus qu'à se baisser pour en ramasser la cargaison. Jusqu'au jour où son ennemi historique, le Vieux Nick, passe sur sa route...